Un soirée d’août en Espagne, on mange sur la terrasse dans l’odeur narcotique du jasmin. La vie est douce, les hôtes sympathiques et la nourriture excellente. Les vacances ne font que commencer. Les enfants courent autour de la grande table en poussant des cris de plus en plus aigus. La grand-mère, agacée mais tendre, saisit le plus petit par le bras et lui dit : «Tiens, Pablito cueille quelques fleurs et va les mettre sous l’oreiller de ta mère. » L’enfant ravi s’exécute en riant et tandis qu’il cueille les délicates fleurs blanches, Paula se penche vers moi et me chuchote à l’oreille : moi je trouve que le jasmin ça sent la m…. Je ris, Paula a son franc-parler mais je sens bien qu’elle n’a pas tout tort : Oui, peut-être tu as raison, mais pas seulement, pas seulement… Je n’arrive pas à en dire plus. Impossible de prendre la défense du jasmin, je n’ai pas les mots pour le faire. Non, je ne peux rien dire sur cette odeur qui pourtant depuis le début de la soirée m’a plongée dans une douce torpeur.
Aujourd’hui, Paula, je pourrais te raconter le jasmin : son départ fruité, juteux et vert, ses accents de cassis, de citron, de banane écrasée, toute miellée. Je te dirais : écoute comme il est à la fois fragile et puissant, comme il se déploie tout doucement dans la nuit, reste tranquille et tu entendras ce murmure floral, velouté, orangé, gras, cireux, vibrant. Finalement laisse-toi emporter par la sensualité de son haleine lourde où les notes animales se mêlent à celles des pêches et des abricots. Il est tout en pleins et en courbes. Il est beau et la beauté n’est pas toujours confortable, elle n’est pas sans aspérités, elle n’est pas lisse, sinon elle ne serait que de la joliesse. Le jasmin n’est pas joli, il est beau. Tu entends Paula ? Mais ce soir là je reste silencieuse et la conversation repart sur un autre sujet, les vacances continuent et j’oublie le jasmin jusqu’à un autre mois d’août. Mais ça, c’est une autre histoire.
En effet, le jasmin n'est pas joli. Depuis maintenant un bon moment, je ne le supporte qu'a petite dose dans les parfums, parce que dans le parfum il est plus fort, plus imposant, plus carné que dans la brise d'un soir d'été. Fatiguée de Joy et de tous ses petits potes, il me le faut stylisé avec d'autres comme dans un N°5, ou allégé comme dans Le Jasmin de Goutal. En revanche , je ne trouve pas qu'il sente la m..., désolée Paula.
Rédigé par : Poivrebleu | 17 septembre 2007 à 22:53
Hmmmmmm le nez délicat de Paula devait buter sur le côté animal du jasmin… Celui-ci, c’est vrai ne plaît pas à tout le monde mais son côté charnel est quand même ce qui fait sa beauté en quelque sorte. Mais en parfumerie, comme partout, les goûts et les couleurs diffèrent beaucoup et c’est très bien ainsi… Depuis que j’étudie (ce mot ne semble pas convenir…) la parfumerie mes goûts ont beaucoup évolués et continuent de le faire, ma perception des matières premières et des parfums n’est plus la même qu’au début. Au début, le jasmin ne me parlait pas vraiment mais peu à peu des souvenirs sont venus se greffer sur son odeur et aujourd’hui, pour moi, sentir le jasmin c’est, un peu, comme retrouver un vieil ami…
Rédigé par : Nathalie | 18 septembre 2007 à 19:31